N° 42 - Janvier/Février 2012
ISSN : 1772-7200
Les études les plus récentes sur le judaïsme après 70, date de la destruction du temple de Jérusalem, et la remise en cause de l’hégémonie du rabbinisme nécessitent de revenir sur les travaux antérieurs. En effet, le judaïsme d’après 70 ayant été tout aussi pluriel que celui d’avant, il convient de construire une histoire qui tienne compte des différents mouvements en considérant que le temple de Jérusalem a été remplacé par les synagogues, lesquelles ont existé bien avant sa destruction, tant en Palestine qu’en Diaspora. Le seul élément qui change entre l’avant et l’après 70, c’est finalement la disparition du temple de Jérusalem. Dans une telle configuration, il devient de plus en plus évident que les rabbins sont, d’une manière ou d’une autre, les descendants des pharisiens. D’autre part, les mouvements des chrétiens et des rabbins apparaissent comme des groupements interstitiels et non comme des cultes officiels, lesquels sont représentés par les synagogues. En bref, le judaïsme synagogal d’après 70, comme le judaïsme sacerdotal d’avant 70, représente le culte officiel de la nation judéenne. Les rabbins mettront plusieurs siècles à s’en emparer, et ceux originaires de Babylonie n’y parviendront qu’avec l’expansion musulmane. Encore leur influence ne s’étendra-t-elle, jusqu’aux Xe et XIe siècles, que sur les territoires conquis, à l’exclusion de l’Empire byzantin et des royaumes issus des invasions barbares.
La personnalité publique de Cyrille, son implication historique dans diverses tensions, popularisées récemment par le film d’Alejandro Amenábar (Agora, 2009), occultent parfois sa dimension intellectuelle : le patriarche combatif est en même temps, et sans doute avant
tout, le dernier – et non le moindre – des grands Alexandrins, le penseur qui a su faire la synthèse d’une très riche tradition culturelle et philosophique appliquée, depuis le judaïsme hellénistique et les premières écoles chrétiennes, à la lecture de l’Écriture et au traitement des questions théoriques qui se posent dans les communautés.
Auteur : Agnès Bastit - Philippe Luisier
Magazine : Religions & Histoire n° 42 Page : 58-59