N° 38 - Mai/Juin 2011
ISSN : 1772-7200
Au mois de mai découvrez dans votre revue d'histoire des religions : Confucius, du mythe à l'histoire Il est des figures de l'histoire qui appartiennent au patrimoine universel. Confucius en est une. Maître Kong (en chinois Kongzi) et sa philosophie, sans cesse reprise, étudiée, transformée, ont traversé les siècles, entre gloire et rejet. La Chine qui renoue aujourd'hui avec le Sage ne l'a en effet pas toujours adulé. Prise entre les courants bouddhistes et taoïstes, utilisée à des fins politiques, honnie au nom d'une idéologie communiste qui souhaitait faire table rase d'un passé jugé aliénant, la pensée confucéenne présente une myriade de facettes où se reflètent les temps, les cultures, les systèmes qui l'ont exploitée. Nourri de tous ces apports, le confucianisme entreprend aujourd'hui de conquérir le monde en sourdine. Quant à Confucius, le grand méconnu, on lui construit une nouvelle identité, adaptée au goût du jour. Mais, il importe de le rappeler, le Maître est de ceux que l'on ne connaîtra jamais vraiment. Son être historique nous échappe, faute de sources contemporaines. Il est mythe et légende, reconstruction sans cesse réitérée. Reste la possibilité, ô combien stimulante, d'étudier sa postérité et ses mille et un portraits réinventés à partir de textes, de traditions et d'une œuvre, supposée ou réelle. Entre histoire, philosophie et religion.
Tout au long du XXe siècle, le confucianisme a fait l'objet d'attaques multiformes. Dans les années 1920, le mouvement dit de la « nouvelle culture » s'en prend fortement à toutes les sources culturelles du déclin de la Chine et invite à « abattre la boutique de Confucius ». Sur la figure du Sage se cristallise alors symboliquement, pour beaucoup de jeunes patriotes de l'époque, le rejet de tout ce qui empêche la Chine de suivre le Japon sur la voie de la modernité inspirée par l'Occident. La Chine maoïste perpétue cet héritage en combattant les « quatre vieilleries » (idées, culture, coutumes, habitudes) et en lançant, pendant la Révolution culturelle, une célèbre campagne de critique de Confucius et de Lin Biao. Avec la politique de réforme et d'ouverture conduite depuis le début des années 1980, le pays connaît des mutations profondes et un processus d'affirmation de l'individu dans les domaines les plus divers : activité économique et professionnelle, relations familiales, relations entre les sexes, références culturelles, etc. Un tel contexte pourrait laisser penser que le confucianisme est tout simplement sorti de l'histoire. Pourtant, depuis une dizaine d'années, on y fait de nouveau largement référence, sous des formes diverses.
Auteur : Sébastien Billioud
Magazine : Religions & Histoire n° 38 Page : 58-63
Date : 26/04/2011