N° 236 - septembre 1998
ISSN : 1141-7137
On mesure encore mal l'importance que revêt la mise au jour des manuscrits de Nag Hammadi. C'est tout l'intérêt de ce Dossier d'Archéologie que d'en montrer, sous la plume des meilleurs spécialistes du sujet, toute l'ampleur. Survenue en 1945 en Haute Egypte, cette découverte de treize volumes, appelés codices, renfermant quelque cinquante-six traités coptes, pour la plupart gnostiques, est avec celle des manuscrits de la mer Morte en 1947, l'une des plus grandes découvertes du XXe siècle en matière de texte ancien.
Un ancêtre philosophe se cacherait-il derrière chaque gnostique ? Les Pères de l'Eglise le pensaient. S'ils considèrent volontiers – et à bon droit – Platon et le platonisme comme ce qui a nourri la pensée de Valentin et de ses disciples, ils établissent aussi de bien curieuses filiations : Aristote aurait inspiré Basilide, et Empédocle Marcion ! La diversité des doctrines gnostiques s'expliquait, croyait-on, par la prolifération des Ecoles philosophiques. Qu'il y ait un air de famille entre gnostiques et philosophes, l'idée est toujours présente dans les études phénoménologiques du XXe siècle. Ce qu'elles cherchèrent à comprendre fut l'unité du gnosticisme, plutôt que sa diversité. Comme le montre par exemple, à partir de 1934, l'œuvre de Hans Jonas, elles crurent pouvoir rendre compte de cet air de famille commun aux gnostiques et aux philosophies de l'époque en en faisant l'expression de ce que Hegel à la fin de sa Phénoménologie de l'Esprit appelle la ?conscience malheureuse?.
Auteur : Tardieu (M.)
Magazine : Dossiers d'Archéologie n° 236 Page : 20-23